L'improbable dénouement
Quel improbable
dénouement: Stéphane
Dion, député de Saint-Laurent/Cartierville, a remporté la course à la
direction du Parti libéral du Canada, samedi soir.
Je ne suis pas un partisan
libéral. Je suis un souverainiste, pour des raisons qui n'ont rien à voir avec
une quelconque anglophobie ou nostalgie amère d'un certain passé. Dans cette
optique, je n'ai jamais été offusqué par les tentatives fédérales visant à
mettre des bâtons dans les roues de la cause souverainiste. Après tout, mis à
part le Bloc Québécois, tous les partis fédéraux aspirent à garder le Canada
uni car c'est ainsi qu'ils l'aiment, qu'ils acceptent d'aller se faire
charcuter sur la place publique.
Je ne vois pas dans le
Parti libéral l'ennemi à abattre de la souveraineté. Jusqu'au jour de la
victoire souverainiste, je verrai les Québécois eux-mêmes comme le seul ennemi
— non pas à abattre, mais à persuader — de la souveraineté.
Si je suis un partisan
bloquiste, et que je crois que ce parti, même condamné à l'opposition,
représente le mieux les intérêts du Québec sur la scène fédérale, je ne peux
pas renier l'apport positif du PLC pour autant. Je le répète souvent, mes
convictions sont à gauche, et le PLC demeure un parti de gauche. La plateforme
libérale est moins audacieuse que celle du NPD, mais l'audace apporte également
son lot d'incertitudes et l'incertitude n'est pas nécessairement ce qui est le
mieux pour le Canada en ce moment.
Contrairement à un fort
pourcentage des Québécois, je ne conserve cette vision de scandale envers le
PLC. Un scandale, après tout, c'est une pratique immorale qui est apparue aux
yeux du public. Or, il y a probablement, dans tous les partis, des pratiques
immorales qui n'apparaissent pas aux yeux du public, donc on n'en fait pas des
scandales. Je ne pense pas que les libéraux se lancent aussi rapidement dans de
nouvelles fraudes de ce type-là, même avec, à sa tête, un homme réputé pour
être un ardent anti-souverainiste.
Tous ces détours pour dire
que j'espère la souveraineté québécoise, mais le Québec est encore une province
canadienne et pour le Canada, je pense que le PLC représente, malgré tout, un
parti à considérer. Même si le Québec était déjà un pays, je me soucierais de
la politique du pays limitrophe qu'il serait, tout comme je me soucis de ce qui
se passe à Washington.
La surprise est totale, mais au moins, la PLC a désormais un chef, ce qui est un atout non négligeable s'il veut redevenir le contrepoids des conservateurs qu'il était avant. Stéphane Dion a peut-être gagné par des jeux de coulisses, sa philosophie a évolué ces dernières années, atténuant un peu l'image de l'intello arrogant qu'il était. J'espère qu'il aura le caractère et le charisme pour rallier à lui tous les membres du PLC et pour confronter efficacement les conservateurs aux communes. Même si je souhaite une victoire étincelante du Bloc au Québec lors de prochaines élections, je souhaite — pour une rare fois — une victoire étincelante (donc pas minoritaire) des libéraux dans le ROC.